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50 ans de l'Institut d'Etudes du Judaïsme : historique de l'IEJ et soirée d'anniversaire




L'Institut d'Etudes du Judaïsme a 50 ans


Le 17 décembre 1970, trente-quatre personnes se réunissent en Assemblée Générale pour créer l’ASBL « Institut universitaire d’Études du Judaïsme Martin Buber ». Ils déclarent alors que « Le judaïsme présente de nombreux aspects qui doivent s’ouvrir à la connaissance. Pour que celle-ci soit aussi objective que possible, l’étude du phénomène juif s’impose dans le cadre universitaire ; elle doit être le lot de penseurs et de chercheurs, venant de tous les horizons de la pensée. C’est à de tels hommes, professeurs et étudiants, qu’il sera fait appel. Pareille entreprise ne peut que contribuer à plus de compréhension et plus de concorde. » Vingt-quatre personnes composent le premier Conseil des Administrateurs, à savoir des professeurs attachés principalement à l’ULB et à la VUB, mais également à d’autres universités belges. Maître Raymond Abrahams est élu Président, le Professeur Georges Schnek, vice-président, et, en sa qualité de directeur du Centre national des Hautes Études Juives, qui existe depuis 1959, M. Willy Bok est désigné secrétaire. C’est lui qui assurera la gestion journalière de l’Institution. Plus tard, il recevra le titre de directeur de l’Institut et M. Georges Reichenberg sera nommé Trésorier de l’Institut, poste qu’il conservera pendant près de cinquante ans.


Immédiatement, ils se mettent au travail, et, le 13 mai 1971, les premiers statuts paraissent au Moniteur Belge. Puis, l’Institut propose comme première séance inaugurale, le 1er février 1972, la conférence d’Emmanuel Lévinas intitulée « Connaître et rencontrer Martin Buber ». Les cours, quant à eux, commencent en février 1972. L’Institut est alors situé avenue Jeanne, dans le grand bâtiment de sociologie et les séances ont lieu principalement dans les auditoires du bâtiment H. Le financement de l’Institut est assuré en partie par un subside de la Communauté française de Belgique.



Les conférences et les cours sont rapidement très bien accueillis par un public intéressé. En 1977, dans les Nouvelles de l’Institut, M. Willy Bok fait un bilan des cinq premières années d’activité de l’Institut. Il écrira : « Nous avons eu le plaisir de constater que plusieurs cycles de conférences ont connu un réel retentissement. Certes, la fréquentation d’un enseignement qui ne débouche sur aucune carrière déterminée, dépend d’un grand nombre d’aléas. Or, malgré ce caractère non-contraignant de l’enseignement, le public lui a réservé un accueil très favorable. Ce fait est pour nous un motif de satisfaction. On peut estimer qu’en moyenne 300 personnes suivent chaque année un ou plusieurs cycles de conférences. […] Après avoir tâtonné pendant environ deux ans, notre choix s’est finalement porté sur une formule mixte qui consiste à proposer à la fois un enseignement s’échelonnant sur plusieurs années d’études et un enseignement court portant sur un sujet précis. […] Depuis l’inauguration de l’Institut Martin Buber jusqu’à la fin de l’exercice précédent, nous avons organisé 1057 heures de leçons et de conférences et fait appel à 52 professeurs. […] ». Les étudiants de l’Institut pouvaient alors suivre les cours comme « auditeurs libres », ou bien s’inscrire à un Diplôme Supérieur. Les étudiants de l’ULB, quant à eux, retrouvaient dans leurs programmes différents cours de l’Institut. Une collaboration a également existé avec l’INALCO à Paris. Elle permettait à l’Institut de proposer à ses étudiants un cursus complet d’études hébraïques allant du premier au troisième cycle.


Public lors de la conférence inaugurale à l'Institut d'Etudes du Judaïsme (1972)

Au milieu des années 1980, l’Institut a évolué. En effet, en 1985, l’IEJ signait une convention avec l’ULB et l’Institut d’Études des Religions et de la Laïcité (IERL) qui créait ainsi la section juive du Diplôme d’Études des Religions et de la Laïcité. Cela a conduit, en 1986, à un déménagement au 17 av. Roosevelt, des murs qu’il partageait avec l’IERL. Peu après, le 7 mars 1988, l’Institut était reconnu comme établissement d’utilité publique. La même année, l’Institut universitaire d’Études du Judaïsme – section anversoise, inaugurait ses premiers cours sous les auspices de l’Universiteit Antwerpen. En 2002, la section néerlandophone sera définitivement séparée de l’Institut francophone. Encore à la même période, Mme Sonia Dratwa-Pinkusowitz était engagée comme professeur de yiddish. C’est elle qui créera, dans notre Institut, quelques années plus tard, le premier Séminaire international de yiddish en Europe. Alors que depuis ses débuts l’Institut organisait principalement des cours et des conférences, de plus en plus souvent, différents événements tels que des colloques et des séminaires y voyaient le jour, notamment organisés par Mme Anna Kempinska.


En 2001, M. Willy Bok, directeur de l’Institut depuis 30 années, cèdera sa place à M. Thomas Gergely, romaniste, professeur à l’ULB. Cette année-là, l’Institut inaugurait la collection Mosaïque avec l’ouvrage du Baron Jean Bloch, « Épreuves et combats. 1940-1945 ». L’objectif de la collection, qui compte dix-sept livres en 2022, est décrit ainsi : « Sans que Mosaïque se fixe comme ligne éditoriale d’aborder seulement la judéité belge, elle se voudra l’expression des enseignements de l’Institut dont elle émane, des enseignements libres de tout esprit d’apologie et respectueux des valeurs qu’ils défendent ».


Depuis 2005, avec le décret de Bologne et l’instauration des Masters, le programme du Master évolue. L’IERL devient le CIERL en 2003 et, par une convention signée en 2005, l’Institut devient partenaire de l’ULB à la Faculté de Philosophie et Lettres (depuis 2012, Faculté de Philosophie et Sciences Sociales). L’Institut continue de prêter ses cours à différents programmes de l’ULB, notamment au Master en Sciences des Religions et de la Laïcité, et propose son propre Diplôme en Histoire, Pensée et Civilisation Juives.


Durant toutes ces années, des centaines de professeurs ont enseigné à l’Institut, dans le cadre de nos cours, de nos conférences ou de nos colloques, venant de Belgique, mais également de France, d’Israël ou encore des Etats-Unis. Il est impossible de tous les citer. Chaque année, une leçon inaugurale ou de clôture de l’année académique est organisée, permettant d’accueillir des conférenciers de renom tels Emmanuel Lévinas, Ilia Prigogine, Robert Badinter ou encore le Père Patrick Desbois. On peut également citer M. Eliyahou Reichert qui enseigne l’hébreu contemporain depuis la toute première année, en 1971.


Depuis la création de l’Institut, une centaine de personnes ont obtenu le Diplôme Supérieur en Histoire, Pensée et Civilisation juives. Des centaines d’étudiants de l’ULB ont suivi des cours de l’Institut dans le cadre de l’ancien DEA en Sciences des Religions – Spécialisation Histoire, Pensée et Civilisation juives, ou dans le cadre d’autres programmes d’études ou encore, plus récemment, dans le cadre du Master en Sciences des Religions. Et des milliers d’auditeurs ont participé à nos cours.


Le bâtiment hébergeant l'Institut d'Etudes du Judaïsme et sa bibliothèque

On ne saurait clôturer cet article sans mentionner la bibliothèque de l’Institut, la plus grande bibliothèque de Belgique consacrée au judaïsme. Elle contient plus de 10.000 ouvrages scientifiques et s’est étoffée, au fil des années, grâce au travail des bibliothécaires successifs, de M. Eliyahou Reichert à M. Vincent Decaestecker, et à de nombreux dons. Depuis cinquante ans, l’Institut emploie des chercheurs et en soutient d’autres qui travaillent sur le judaïsme. Enfin, de nombreuses personnes ont participé à la vie de l’Institut aux différents postes administratifs, comme Mme Monique Chalude, que ce soit en tant qu’employés ou bénévoles.


Le 25 octobre 2022, après deux ans de reports dus au Covid, notre Institut a célébré, avec une conférence donnée par notre Président, M. Guy Haarscher, ces cinquante années d’existence et de riches activités auxquelles notre directeur, M. Thomas Gergely, lors de son discours, a souhaité, selon la tradition, de se maintenir jusqu’à 120 ans, voire plus.

Angélique Burnotte,

Assistante de direction et chercheuse à l’Institut.

 

Jusqu'à 120 ans !


Le 25 octobre dernier, devant une salle comble, nous célébrions les 50 années d’existence de notre Institut. À cette occasion, une leçon inaugurale a été donnée, de main de maître, par le Professeur Guy Haarscher.


Le professeur Guy Haarscher lors de la conférence inaugurale de l'Institut le 25 octobre 2022

Après avoir repoussé l’événement à deux reprises à cause des mesures de confinement, c’est finalement entourés de quelque deux cent cinquante personnes que nous avons fêté cet anniversaire si important. Important, car il nous a permis, comme l’a formulé dans son discours d’ouverture notre directeur, le Professeur Thomas Gergely, « de contempler le passé, de comprendre d’où nous venons et peut-être d’essayer de savoir où nous devons aller ».




C’est bien là la mission de l’Institut d’Études du Judaïsme, comme l’a rappelé Mme Valérie Glatigny, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, mission consistant en : « la mise en lumière des savoirs, de l’étude, du travail, du mérite, [...] l’importance du dialogue entre le je et le tu, et la réconciliation entre l’Orient et l’Occident, dans une réciprocité particulièrement féconde ». Cette mission se traduit à la fois dans les thématiques abordées dans les cours et conférences dispensés durant l’année, mais également dans l’intégration de l’Institut au sein de l’Université Libre de Bruxelles. Dans son discours, le Professeur Jean-Philippe Schreiber, représentant la Professeure Annemie Schaus, rectrice de l’ULB, a d’ailleurs souligné la relation étroite entre nos deux institutions, et ce, depuis un demi-siècle.




En effet, il y a 50 ans, Emmanuel Lévinas donnait la toute première leçon inaugurale au sujet de l’éminent philosophe juif dont l’Institut porte le nom : Martin Buber. Cette année, c’est le Professeur Guy Haarscher qui a occupé la tribune pour faire réfléchir à cette question, « un rien provocante »,comme le disait Madame la Ministre, « Judaïsme et philosophie, sont-ce de vrais ou de faux amis ? » Avec l’éloquence qu’on lui connaît, Guy Haarscher a fait voyager son public du 1er siècle de notre ère au XXe, en présentant quelques figures majeures qui ont tenté de concilier judaïsme et philosophie, parfois non sans accrocs. Certains, comme Philon d’Alexandrie ou Maïmonide s’efforçaient d’inclure leurs contemporains dans la réflexion, le premier, en expliquant la Bible aux Grecs ; le second, en écrivant son Guide des égarés. D’autres, comme Spinoza ou Leo Strauss « cassent la baraque » et arrachent la religion à la pensée philosophique, considérant que les deux n’étaient pas compatibles. Dans l’exposé de Guy Haarscher, on finit par retrouver un certain Emmanuel Lévinas, pour qui Dieu, étant ce qui est infini, ce qui est impossible à ramener à soi, se trouve dans la vulnérabilité qui se cache chez l’autre. Le rapport avec Dieu s’exprime alors dans la façon d’être en rapport avec l’autre, dans l’éthique, et donc dans la réflexion philosophique.


La soirée s’est clôturée par une brillante prestation musicale du Duo Imedi avec MM. Boleslaw Bieniasz au violon et Mamia Akhvlediani au piano. Tous deux ont présenté des pièces variées de Tomaso Albinoni, Anton Rubinstein, Tchaïkovsky, et bien d’autres.


Le Duo Imedi clôturant la conférence inaugurale de l'Institut le 25 octobre 2022

Si l’Institut perdure depuis 50 ans, c’est grâce à l’investissement de ses professeurs, administrateurs, chercheurs, bibliothécaires et employés, mais également grâce au soutien indéfectible de la Fédération Wallonie-Bruxelles, celui de la Fondation du Judaïsme de Belgique, et, naturellement, de l’ULB. Aussi, en contemplant quelques photos d’archives de la première séance inaugurale, il est touchant de constater que certains auditeurs de l’époque sont toujours à nos côtés, aujourd’hui encore. Eh oui, c’est aussi vous, visiteurs, auditeurs, étudiants qui faites la vie de notre Institut. Alors, merci à toutes et tous. Et « jusqu’à 120 ans ! »

Tsillia Finn,

Chercheuse à l’Institut.

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